LĂ©naDurr s’intĂ©resse aux normes et marges de la sociĂ©tĂ© qu’elle met en scĂšne dans un travail photographique toujours tendre et un peu nostalgique. L’Ɠuvre et le quotidien de l’artiste ne font qu’un puisqu’elle vit elle-mĂȘme dans un mobil-home, Ă  Cuers dans le Var, au milieu d’objets collectĂ©s depuis son adolescence. Habitats sauvages est

Voici la rĂ©ponse Ă  la question de CodyCross - Aussi appelĂ©e Ă©toile filante. Si vous avez besoin d'aide ou avez des questions, laissez votre commentaire ci-dessous. Home Saisons Groupe 76 Phase 4 RĂ©pondre Mode de vie des artistes en marge de la sociĂ©tĂ© Mode de vie des artistes en marge de la sociĂ©tĂ© RĂ©pondre BohĂšme CodyCross CodyCross est un jeu rĂ©cemment sorti dĂ©veloppĂ© par Fanatee. C’est un jeu de mots croisĂ©s qui contient de nombreux mots amusants, sĂ©parĂ©s en diffĂ©rents mondes et groupes. Chaque monde a plus de 20 groupes avec 5 puzzles chacun. Certains des mondes sont la planĂšte Terre, sous la mer, les inventions, les saisons, le cirque, les transports et les arts culinaires.

Sila société m'influence, c'est parce que elle m'impose, ou que j'adhÚre. Les médias en général font de l'info digest, Vite consommée, et vite oubliée. Pour s'informer ,il faut fouiller ailleurs que dans ce qui fait pleurer dans les chaumiÚres. Quant à la mode, j'ai la mienne, pas séante, pas au gout du jour, mais qui me convient.

Accueil Revues Espaces et sociĂ©tĂ©s NumĂ©ro 2017/4 n° 171 Zone l’espace d’une vie... Éditorial Zone l’espace d’une vie en marge Suivre cet auteur JĂ©rĂŽme Beauchez, Suivre cet auteur Florence Bouillon, Suivre cet auteur Djemila Zeneidi Dans Espaces et sociĂ©tĂ©s 2017/4 n° 171, pages 7 Ă  18 Suivant ArticlePlanBibliographieAuteursCitĂ© parfile_downloadTĂ©lĂ©charger Article MĂȘme si on dort dans la rue, on n’est pas des loques. On est des chĂŽmeurs, des zonards, des mancheurs, mais on n’est pas des clochards. » Propos anonymes, recueillis dans la rue par Lionelle Reynes 1985, p. 38 1 Alors que le quotidien des jeunes de banlieue » ou des bandes ethniques » focalise depuis plusieurs dĂ©cennies l’attention des sociologues, l’autre visage des jeunesses relĂ©guĂ©es que prĂ©sentent les zonards » reste quant Ă  lui quasi invisible du point de vue des sciences sociales europĂ©ennes. Rares sont en effet les Ă©tudes de ces nomades du vide » Chobeaux, 2004 que seraient ces jeunes de la rue, que l’on dit aussi en errance » Laberge et Roy, 1996 ; Pattegay, 2001 ; Parazelli, 2002. Population sans domicile aux allures bigarrĂ©es, souvent accompagnĂ©e de ses chiens, ils apparaissent surtout dans le rĂŽle du mancheur rĂ©clamant la piĂšce sur le pavĂ© des centres-ville ou au seuil des supermarchĂ©s. À la fois terme vernaculaire et concept proche de l’expĂ©rience, le mot zonard est celui que la plupart choisissent pour se dĂ©signer Pimor, 2014. La zone Ă©voque alors un mode de vie supposant de tracer sa route dans les marges de la sociĂ©tĂ© de consommation Angeras, 2012, d’oĂč les appellations de traceurs ou de routards Ă©galement employĂ©es par certains. 2 L’étymologie du terme renvoie Ă  la zone non aedificandi non constructible qui s’étendait au-delĂ  des fortifications de Paris. AprĂšs la guerre de 1870, la destination exclusivement militaire de cet espace a Ă©tĂ© peu Ă  peu abandonnĂ©e pour cĂ©der la place Ă  l’installation de baraquements, de roulottes et de taudis qui ont regroupĂ© les travailleurs pauvres, les chiffonniers, les vagabonds, les mendiants et autres reprĂ©sentants des classes dangereuses » dont Louis Chevalier a rĂ©alisĂ© une cĂ©lĂšbre historiographie Chevalier, 2002. Aux marges de Paris, les zoniers » incarnent alors la figure du paria urbain qui inquiĂšte ou menace la sociĂ©tĂ© bourgeoise. PhotographiĂ©s par EugĂšne Atget [1] 1913 et filmĂ©s par Georges Lacombe 1928, ils apparaissent comme mis au ban d’une sociĂ©tĂ© industrielle qui les a frappĂ©s d’infamie. 3 Les zonards d’aujourd’hui composent une nouvelle strate de l’archĂ©ologie des marges urbaines. RĂ©cente, elle trouve ses racines syncrĂ©tiques loin des anciennes fortifications de Paris, dans l’entremĂȘlement des subcultures punk et traveller nĂ©es outre-Manche au cours des dĂ©cennies 1970 et 1980. Tandis que la zone d’hier correspondait Ă  un territoire bien dĂ©limitĂ©, celle d’aujourd’hui se matĂ©rialise dans les dĂ©placements de groupes qui Ă©voluent principalement dans les intervalles des villes. Si les zonards contemporains ne sauraient par consĂ©quent ĂȘtre vus comme leurs descendants directs, ils partagent nĂ©anmoins avec les zoniers d’autrefois certaines propriĂ©tĂ©s de situation dans l’espace social. Les uns comme les autres restent en effet confinĂ©s Ă  des espaces caractĂ©risĂ©s par la relĂ©gation, Ă  des situations Ă©rigĂ©es en problĂšme social. Ainsi la prĂ©sence et la visibilitĂ© des zonards – particuliĂšrement remarquĂ©es depuis le tournant des annĂ©es 2000 Ă  l’occasion des festivals dĂ©diĂ©s Ă  la musique ou aux arts de rue – sont-elles le plus souvent envisagĂ©es comme relevant d’une problĂ©matique d’encadrement d’une fraction de la jeunesse considĂ©rĂ©e comme dĂ©viante. Ils font l’objet d’une culture du contrĂŽle » Garland, 2001 qui oscille entre mesures de bannissement prises par certaines mairies et tentatives de rĂ©gulation d’une prĂ©sence dont il s’agit de maĂźtriser les potentiels effets pathogĂšnes. Les questions du sans-abrisme et de l’insĂ©curitĂ© ont dĂšs lors Ă©tĂ© posĂ©es, aux cĂŽtĂ©s des problĂšmes de santĂ© publique liĂ©s aux consommations d’alcool et de produits stupĂ©fiants Chobeaux, 2004, p. 41-42 ; Hurtubise et Vat Laaroussi, 2002 ; Van Hout, 2011. 4 Ainsi la vie et le quotidien des zonards apparaissent-ils essentiellement en nĂ©gatif de ce qu’en disent les pouvoirs publics ou les instances de rĂ©gulation sanitaire et sociale Langlois, 2014. Un nĂ©gatif qui, Ă  la maniĂšre d’une image photographique oĂč les contrastes apparaissent comme inversĂ©s, ne donne Ă  voir qu’un reflet d’une rĂ©alitĂ© dont ressortent les dĂ©fauts, comme les manques. Ce numĂ©ro d’Espaces et SociĂ©tĂ©s a pour objet de proposer une autre prise de vue. Celle-ci ouvre sur une double perspective la premiĂšre cible les modalitĂ©s d’intervention, ou de non-intervention, de la puissance publique vis-à‑vis des habitants et des acteurs de la zone. Hier comme aujourd’hui, comment les institutions font-elles face Ă  des populations qui, de maniĂšre subie ou choisie, se situent Ă  la marge des centralitĂ©s urbaines comme des normes sociales communĂ©ment partagĂ©es ? Quels sont les marges de manƓuvre accordĂ©es, les modalitĂ©s de rĂ©pression, les terrains d’entente Ă©ventuels, et comment se traduisent-ils du point de vue de la gestion de ces indĂ©sirables » ? La seconde focale a pour objet de restituer de l’intĂ©rieur les systĂšmes de valeurs qui orientent les actions des zonards. Du point de vue de ses acteurs, que dĂ©signe au juste ce signifiant dont la plasticitĂ© renvoie aux idĂ©es d’un espace indissociablement physique et symbolique ? Autrement dit, qu’il relĂšve de l’auto-attribution ou du stigmate, Ă  quoi correspond exactement le label zonard dans les mondes de la marge et leurs territoires ? Quels en sont les codes et de quelles façons se transmettent-ils ? 5 Pour rĂ©pondre Ă  cette double interrogation, ce dossier se dĂ©cline en trois thĂ©matiques. Les deux premiers articles traitent de la zone parisienne dans une perspective sociohistorique. Les trois articles suivants proposent une description dense » Geertz, 2003 des modes de vie zonards aujourd’hui, en France, en Allemagne et en Grande-Bretagne. Ces modes de vie valorisent une forme d’entre-soi tentĂ© par le dĂ©tachement vis-à‑vis de la sociĂ©tĂ© instituĂ©e. Enfin, parce que la zone ne constitue jamais un espace totalement Ă  part, l’ensemble se clĂŽt par une analyse du recours aux dispositifs de l’infra-assistance, incluant la maniĂšre dont ce recours s’inscrit dans la construction d’une identitĂ© zonarde revendiquĂ©e. 6 En finalitĂ©, l’objet de ce dossier rĂ©side dans les diffĂ©rentes façons de produire ces formes mouvantes de marginalitĂ©, dont les frontiĂšres indĂ©cises fluctuent entre conceptions Ă©miques la perspective des zonards et visions Ă©tiques celles de la sociĂ©tĂ© instituĂ©e et des pouvoirs publics. PlutĂŽt que de rĂ©duire le flou dont la notion de zone est empreinte, nous avons donc considĂ©rĂ© son caractĂšre labile comme le principal levier d’une approche qui articule espace et histoire ou diachronie et synchronie des usages et des modes de gestion d’une territorialitĂ© marginale. Une sociohistoire de la zone, espace de relĂ©gation7 La premiĂšre partie de notre dossier dĂ©taille le passage de la figure du zonier Ă  celle du zonard, et donc la progressive modification des territoires de la zone. Cette enquĂȘte est ouverte par Anne Granier, laquelle concentre ses efforts sur la pĂ©riode de l’entre-deux-guerres et la microhistoire d’un segment de la zone parisienne situĂ© Ă  Boulogne-sur-Seine. L’auteure s’est consacrĂ©e Ă  retracer la gĂ©nĂ©alogie du peuplement comme des conflits qui ont animĂ© cet espace, marquĂ© par l’la intolĂ©rance des pouvoirs publics Ă  l’égard de ses occupants. En effet, si les pouvoir publics tolĂ©raient l’existence de la zone faute de mieux, par nĂ©cessitĂ© de loger les plus pauvres d’entre les ouvriers qui ne pouvaient s’acquitter des loyers de Paris intra-muros, ils n’avaient pourtant de cesse de vouloir Ă©liminer le problĂšme social qu’ils constituaient Ă  leurs yeux. La tolĂ©rance cĂ©dait alors le pas Ă  l’intolĂ©rance pour des zoniers constamment en porte-Ă -faux vis-à‑vis de la loi. Or, les gens sans aveu » n’ont pas tĂ©moignĂ© seuls subsistent les propos tenus par ceux – dĂ©cideurs politiques, reprĂ©sentants de la loi et, plus rarement, petits propriĂ©taires zoniers – qui Ă©taient en charge de l’administration quotidienne de cette enclave partagĂ©e entre Paris et banlieue, de mĂȘme qu’entre reconnaissance partielle et marginalitĂ©. C’est donc le quotidien de ce territoire ambivalent qu’Anne Granier s’est efforcĂ©e d’exhumer des archives, territoire qui fait moins l’objet d’une rĂ©pression que d’un abandon surveillĂ© oĂč, tout au long des annĂ©es 1920 et 1930, les pauvres sont restĂ©s dans la visĂ©e des pouvoirs publics qui les ont encadrĂ©s mollement, les abandonnant le plus souvent Ă  leur sort, dans l’attente de trouver une hypothĂ©tique solution Ă  leur indigence. 8 Élargissant la focale historique portĂ©e sur la zone de Paris, James Cannon interroge pour sa part la dĂ©clinaison historique des labels de dangerositĂ© et d’infamie que la zone a charriĂ©s tout au long du xxe siĂšcle. De la Belle Époque aux annĂ©es 1970, en passant par l’entre-deux-guerres, l’auteur puise dans diverses sources, dont celles de la littĂ©rature et de la chanson populaire, pour montrer comment les gĂ©nĂ©rations successives de zoniers et de zonards ont incarnĂ© diffĂ©rentes versions des classes dangereuses » Ă©voluant aux marges de Paris. Tour Ă  tour perçus comme des rĂ©volutionnaires en puissance, des agents de l’étranger et des hommes dĂ©pravĂ©s voire les trois Ă  la fois, les zoniers ont constituĂ© une figure marginale et le plus souvent criminalisĂ©e ; cette criminalisation a suivi diverses inspirations, selon les analystes et leurs sensibilitĂ©s idĂ©ologiques ou religieuses. C’est ainsi que la zone et ses habitants apparaissent comme d’efficaces rĂ©vĂ©lateurs de la maniĂšre dont la sociĂ©tĂ© française a construit ses figures de l’altĂ©ritĂ© tout au long du premier xxe siĂšcle. Mais quid des Trente Glorieuses au cours desquelles la zone est effacĂ©e par les travaux du pĂ©riphĂ©rique urbain, disparaissant ainsi en tant qu’espace annulaire qui constituait une ceinture de misĂšre autour de Paris ? Avec l’émergence de la figure moderne du zonard au dĂ©tour de la dĂ©cennie 1970, James Cannon montre que la zone dĂ©mantelĂ©e en tant qu’espace physique se reconstitue comme style de vie marginal ; un style de vie dont les habitudes et les usages de la ville entrent le plus souvent en contradiction avec les rĂšgles, voire les lois en vigueur dans la sociĂ©tĂ© instituĂ©e. La zone, territoire de rĂ©sistances ?9 Le texte de James Cannon, qui se termine par cette Ă©vocation des zonards de la dĂ©cennie 1970, fait ainsi la jonction avec la suite du dossier. En retraçant l’ethnobiographie de Gavroche, JĂ©rĂŽme Beauchez engage en effet un dialogue avec un zonard des annĂ©es 1990 et 2000, dealer de drogues et voyou auto-proclamĂ©, sur le fond d’une anthropologie collaborative [2]. Tandis que le rĂ©cit de cette expĂ©rience de la zone Ă©nonce son code du deal et de la rue, le chercheur interroge les significations d’une telle conduite de vie dont il souligne moins la rĂ©sistance qu’une certaine conformitĂ© avec les principes les plus communs du commerce lĂ©gal et de la sociĂ©tĂ© instituĂ©e. Gavroche dĂ©crit en effet les savoir-faire, comme le savoir-survivre » Zeneidi-Henry, 2002 et les rĂšgles qui prĂ©sident Ă  son mĂ©tier de dealer ; un mĂ©tier dont l’exercice est articulĂ© aux espaces de la zone dans lesquels il fait figure de patron d’une petite entreprise criminelle centrĂ©e sur la maximisation du profit. Les moyens sont ceux des techniques de vente et de management oĂč la violence se justifie par les nĂ©cessitĂ©s d’un marchĂ© dont les Ă©changes – petits ou grands – alimentent un vĂ©ritable capitalisme de la rue. En pĂ©nĂ©trant de plain-pied cette zone partagĂ©e entre les commerces interlopes les plus cachĂ©s et les principes marchands les plus avouĂ©s, l’article offre une perspective incarnĂ©e sur une maniĂšre de vivre et de constituer un territoire dont la marginalitĂ© ne signifie aucunement l’opposition radicale ou l’absence de contact avec la sociĂ©tĂ© instituĂ©e. 10 Une Ă©chelle et un mode de description similaires ont Ă©tĂ© privilĂ©giĂ©s par Marcelo Frediani, dont l’enquĂȘte ethnographique conduite pendant la premiĂšre moitiĂ© des annĂ©es 1990 aux cĂŽtĂ©s des New Travellers en Grande-Bretagne Frediani, 2009 permet d’éclairer la gĂ©nĂ©alogie et le mode de vie de groupes qui ont fortement influencĂ© les gĂ©nĂ©rations actuelles de zonards français [3]. L’auteur dresse un portrait de celles et ceux dont il a partagĂ© la vie quotidienne en camion, sur les routes et dans des campements aussi sauvages qu’éphĂ©mĂšres ; une vie que l’auteur dĂ©crit comme adossĂ©e Ă  une culture alternative inspirĂ©e d’un syncrĂ©tisme d’influences marginales qui vont du mouvement hippie Ă  l’anarcho-punk, en passant par les spiritualitĂ©s new age, la musique Ă©lectronique et les free parties [4]. Tout l’enjeu du texte de Marcelo Frediani consiste dĂšs lors Ă  rassembler ces faisceaux d’influences et d’expĂ©riences autour de la question du besoin radical » d’espace qui aurait conduit les Travellers Ă  prendre la route. Que l’on ne s’y trompe pas un tel besoin n’est pas aussi trivial qu’un simple appel de la vie au grand air. S’il est radical, c’est justement parce qu’il rĂ©pond, selon le chercheur, Ă  une nĂ©cessitĂ© créée par les forces d’éviction du capitalisme nĂ©olibĂ©ral qui poussent les plus fragiles vers les marges du salariat et de l’habitat conventionnel. Il s’agit alors aussi bien d’échapper Ă  la spirale de l’enfermement dans les logiques du dĂ©classement que de combler ses besoins vitaux – se nourrir, se loger, nouer des rapports sociaux – et de s’engager dans une forme de radicalisme infrapolitique, ou de contre-culture, capable de constituer une alternative Ă  l’éviction. Cette alternative s’exprime au travers des communautĂ©s de pratique » que forment les Travellers en s’inscrivant dans des rĂ©seaux d’entraide fondĂ©s sur un socle de valeurs communes. Elle constitue Ă©galement une forme de retournement des stigmates qui conduit les Ă©vincĂ©s Ă  faire de leur Ă©viction un principe de libertĂ© ou, Ă  tout le moins, de rĂ©invention d’un espace du quotidien qui semble reprendre ses droits aux marges de la sociĂ©tĂ© instituĂ©e [5]. 11 Nombre de parallĂšles peuvent ainsi ĂȘtre tracĂ©s avec la zone de Gavroche dĂ©crite par JĂ©rĂŽme Beauchez. Dans les deux cas, l’engagement marginal relĂšve moins d’une opposition que d’une alternative aux fonctionnements socio-Ă©conomiques marquĂ©s par les logiques d’exclusion du capitalisme nĂ©olibĂ©ral. Tandis que Gavroche s’est contentĂ© de les retourner Ă  son avantage dans les territoires oĂč il s’est comportĂ© en patron de sa petite entreprise criminelle, les Travellers rencontrĂ©s par Marcelo Frediani ont pour leur part conçu une critique radicale de ces fonctionnements. Cela Ă©tant, pas plus que Gavroche, ils n’envisagent de fonder un mouvement qui aurait pour objet de promouvoir un changement de sociĂ©tĂ©. De leur point de vue, il s’agirait plutĂŽt d’échapper Ă  sa violence et de prendre le large, entre soi. 12 Un entre-soi que l’anthropologue et photographe Ralf Marsault a Ă©galement documentĂ© depuis sa longue expĂ©rience des Wagenburgen berlinoises. Celles-ci dĂ©signent les rassemblements de caravanes et de camions qui ont commencĂ© Ă  s’établir dans les friches et autres interstices de la ville peu aprĂšs la chute du Mur Ă  la fin de l’annĂ©e 1989 Marsault, 2010. Ouverts illĂ©galement, ces espaces oĂč se sont installĂ©s Travellers, punks et zonards issus de toute l’Europe avec une majoritĂ© de Britanniques et de Français font l’objet d’une certaine tolĂ©rance de la part des pouvoirs publics. De tels campements constituent un excursus europĂ©en Ă  l’histoire des Travellers retracĂ©e par Marcelo Frediani, de mĂȘme qu’une sorte de pendant germanique et fin de siĂšcle le xxe plutĂŽt que le xixe de la zone parisienne. À l’instar de cette derniĂšre, nombre de Wagenburgen se sont en effet Ă©tablies sur une ancienne zone militaire non aedificandi celle du no man’s land qui sĂ©parait l’Est et l’Ouest de Berlin Marsault, 2010, p. 36. Il n’est pas jusqu’à l’appellation de Wagenburg qui ne garde une connotation martiale, puisque le terme a d’abord dĂ©signĂ© une tactique de dĂ©fense consistant Ă  Ă©riger un mur de chariots » Wagen signifiant le vĂ©hicule et Burg l’idĂ©e de place forte pour parer les attaques de l’ennemi sur les champs de bataille. De loin en loin, cette idĂ©e semble perdurer aujourd’hui parmi les Wagenburger. La plupart conçoivent leur mode de vie Ă  la façon d’une rĂ©sistance – certes plus passive qu’agressive – impliquant une stratĂ©gie de repli qui les prĂ©serverait des obligations comme des injonctions Ă  la normalisation. Ralf Marsault se concentre alors sur les constructions qui font la Wagenburg – ses venelles, ses placettes et ses maisons –, et procĂšdent d’un ensemble de matĂ©riaux de rĂ©cupĂ©ration que les Wagenburger dĂ©tournent afin de concevoir une maniĂšre originale d’investir leur territoire et de l’habiter. Ce systĂšme d’objets est conçu par l’auteur comme la projection au sol des reprĂ©sentations qui animent les habitants. Au-delĂ  d’une simple figure du campement, cette hypothĂšse lui permet d’observer la Wagenburg comme une tentative de situationnisme sauvage qui n’est pas sans Ă©voquer une version punk de la Nouvelle Babylone imaginĂ©e par Constant [6]. Tracer les cartes de significations » d’une subculture marginale13 Outre les convergences dĂ©jĂ  relevĂ©es, les trois Ă©tudes prĂ©sentĂ©es au point prĂ©cĂ©dent partagent un mĂȘme intĂ©rĂȘt pour ces territoires qui sont le fait d’individus et de groupes Ă©voluant dans ce que Patrick Brunetaux et Daniel Terrolle Ă©d., 2009 ont appelĂ© l’ arriĂšre-cour de la mondialisation ». Depuis l’enracinement subjectif dans la zone de Gavroche jusqu’aux objets qui peuplent le territoire des Wagenburger en passant par le systĂšme de valeurs des Travellers, cette arriĂšre-cour a Ă©tĂ© investie par des enquĂȘtes qui, sans pour autant sacrifier Ă  une forme de romantisme des marges, ont refusĂ© l’essentialisation misĂ©rabiliste conduisant Ă  enfermer les pauvres dans leur pauvretĂ©, ou Ă  condamner les dĂ©classĂ©s au dĂ©classement. Par la mise en Ă©vidence du tout un savoir-survivre – fĂ»t-il parfois violent comme dans le cas de Gavroche –, il s’est plutĂŽt agi de souligner l’agentivitĂ© alternative [7] dont font preuve celles et ceux qui s’efforcent de construire une Ă©chappatoire et d’inventer leurs territoires en marge de la sociĂ©tĂ© instituĂ©e. Pour autant, celle-ci ne disparaĂźt pas d’un quotidien fait d’évitements, mais aussi de frottements plus ou moins rĂąpeux avec des institutions et des lois censĂ©es encadrer celles et ceux qui affichent leur souhait d’y Ă©chapper. 14 Ces frottements sont au cƓur de l’article signĂ© par CĂ©line RothĂ©, laquelle nous ramĂšne en France, pour conclure ce dossier par une rĂ©flexion sur la façon dont les zonards perçoivent et utilisent les dispositifs d’assistance qui leur sont destinĂ©s, en particulier celui d’un accueil de jour dit Ă  bas seuil d’exigence. Ce lieu est pris dans une nĂ©gociation permanente entre logiques zonardes et relatif effacement des travailleurs sociaux, qui maintiennent toutefois la prĂ©sence discrĂšte d’un cadre assorti de ses rĂšgles. Rien du style de vie des zonards n’est forclos de ce lieu les chiens y ont droit de citĂ© mais en nombre limitĂ©, tout comme les substitutifs aux opiacĂ©s dont la consommation addictive – comme celle d’autres substances – concerne un nombre consĂ©quent de celles et ceux qui disent avoir choisi la rue. L’idĂ©e d’un tel choix, comme ses mises en rĂ©cit, fournissent Ă  la chercheuse un matĂ©riau Ă  partir duquel sont interrogĂ©es des conceptions de la mobilitĂ© et du territoire qui voudraient renverser la situation de relative assistance dans laquelle la sociologue trouve ses enquĂȘtĂ©s. À ce titre, les lieux de l’urgence sociale ne sont pas de simples pourvoyeurs de services de premiĂšre nĂ©cessitĂ© ; ils apparaissent avant tout comme des lieux de socialisation zonarde et de requalification symbolique pour les reprĂ©sentants de ces groupes par ailleurs largement disqualifiĂ©s. 15 La recherche sur la zone et ses expĂ©riences n’en est encore qu’à ses balbutiements. Cette livraison d’Espaces et SociĂ©tĂ©s propose une premiĂšre articulation d’enquĂȘtes Ă  partir desquelles sont retracĂ©es quelques-unes des cartes de significations » qu’utilisent les zonards pour s’orienter dans leurs mondes [8]. Situer de tels rĂ©seaux de signifiance dans l’histoire et les espaces de la zone nous a conduits Ă  apprĂ©hender les diffĂ©rentes façons dont ses acteurs donnent du sens Ă  leurs conduites comme aux styles de vie qu’ils ont privilĂ©giĂ©s ; pratiques fondĂ©es dans une certaine promotion de la solidaritĂ©, mais qui se paye parfois au prix fort de la rue, dont les duretĂ©s n’épargnent pas ceux qui disent l’avoir choisie et l’aimer. 16 Si les anthropo-logiques zonardes sont des visions du monde et des solutions pour le vivre, leur comprĂ©hension de l’intĂ©rieur constitue dans le mĂȘme temps une condition sine qua non pour Ă©tablir une base de dialogue capable de faire socle Ă  une vĂ©ritable rencontre entre le monde des institutions et celui des zonards, lequel ne saurait ĂȘtre rĂ©duit Ă  un espace oĂč rĂ©gnerait l’anomie. Tandis que les communitas qu’ils forment apparaissent au premier regard comme des contre-structures » dont les dĂ©rĂšglements se heurtent aux principes organisateurs de la sociĂ©tĂ© instituĂ©e Turner, 1990, les enquĂȘtes prĂ©sentĂ©es ici laissent apparaĂźtre les multiples points de jonction qui nous rapprochent d’eux. Voici sans doute l’une des questions fondatrices des sciences sociales Ă  laquelle nous confronte l’étude de la zone. Car il en va ici comme de toute production d’altĂ©ritĂ©, qui soit maximise la dissemblance pour la cĂ©lĂ©brer ou la condamner, soit insiste sur la ressemblance afin d’annihiler les diffĂ©rences. PlutĂŽt que de la refermer, ce dossier ambitionne de rĂ©vĂ©ler une nouvelle facette de cette question, qu’il ne faut assurĂ©ment pas cesser d’ouvrir. Notes [1] Atget EugĂšne, 1913, Zoniers, sĂ©rie de photographies rĂ©alisĂ©es Ă  Paris entre 1899 et 1913, archivage sur le site internet de la BibliothĂšque nationale de France, [url consultĂ© le 14 avril 2017. [2] Beauchez a exposĂ© ailleurs la vision comme les dĂ©terminants biographiques de son enquĂȘte Beauchez, 2017. Tout comme Tristana Pimor a rĂ©flĂ©chi dans les colonnes d’Espaces et SociĂ©tĂ©s Ă  ces formes de symĂ©trie dans l’investigation qu’elle a coconstruite avec un groupe de zonards Pimor, 2016. [3] Sur le mĂȘme sujet, voir Ă©galement l’ouvrage pionnier de Kevin Hetherington 2000 ou les photographies publiĂ©es par Traveller Dave Fawcett, qui a mis en images sa communautĂ© nomade et leurs façons d’habiter en perpĂ©tuel voyage Fawcett, 2012. [4] Il s’agit de fĂȘtes techno tenues en plein air, le plus souvent sans autorisation et, donc, sur des terrains ou des champs squattĂ©s pour l’occasion. [5] Cette importance de la rĂ©appropriation d’un territoire en tant qu’ancrage d’une identitĂ© positive – et non plus seulement dĂ©finie par la nĂ©gativitĂ© du dĂ©faut ou du manque – a Ă©tĂ© soulignĂ©e par Emmanuel Renault et Djemila Zeneidi Ă  partir de l’enquĂȘte que celle-ci a menĂ©e pendant plusieurs annĂ©es dans une friche industrielle transformĂ©e en scĂšne artistique anarcho-punk Renault et Zeneidi-Henry, 2008. [6] New Babylon est une utopie architecturale pensĂ©e par Constant Nieuwenhuys, un artiste nĂ©erlandais fondateur du mouvement Cobra et compagnon de route de l’Internationale situationniste. L’idĂ©e fondatrice de la Nouvelle Babylone – Ă  laquelle Constant a travaillĂ© de 1956 Ă  1974, influençant toute une gĂ©nĂ©ration d’architectes et d’urbanistes – est que les relations sociales doivent ĂȘtre au principe de l’édification spatiale d’une ville nomade, entiĂšrement montĂ©e sur pilotis et dont les configurations sont conçues comme perpĂ©tuellement mouvantes les bĂątiments sont modulables au grĂ© des situations que crĂ©ent les habitants Ă  propos de l’Ɠuvre de Constant, voir Zegher et Wigley Ă©d., 2001. [7] Ou de documenter les compĂ©tences prĂ©caires », qui dĂ©signent les multiples savoir-faire et savoir-ĂȘtre, inĂ©galement protecteurs, acquis au cours de l’expĂ©rience de la prĂ©caritĂ© par les acteurs sociaux disposant de faibles ressources Ă©conomiques, sociales et symboliques Bouillon, 2009, p. 203-213. [8] Au sens oĂč Stuart Hall et Tony Jefferson ont Ă©crit que les cartes de signification » maps of meaning consistent dans les aspects d’une subculture Ă  partir desquels ses membres dessinent l’intelligibilitĂ© de leur environnement quotidien Hall et Jefferson Ă©d., 2006, p. 4. Une sociohistoire de la zone, espace de relĂ©gationLa zone, territoire de rĂ©sistances ?Tracer les cartes de significations » d’une subculture marginale RĂ©fĂ©rences bibliographiquesAngeras AnaĂŻs, 2012, Du nomadisme contemporain en France. Avec les saisonniers agricoles en camion, ouvrage ligneBeauchez JĂ©rĂŽme, 2017, L’ethnographe dans le sous-terrain fragments biographiques », Anthropologica, vol. 59, no 1, p. 101-113. En ligneBouillon Florence, 2009, Les mondes du squat. Anthropologie d’un habitat prĂ©caire, Paris, Presses universitaires de Patrick et Terrolle Daniel Ă©d., 2010, L’arriĂšre-cour de la mondialisation. Ethnographie des paupĂ©risĂ©s, Brignais, Les Éditions du Louis, 2002 [1958], Classes laborieuses et classes dangereuses Ă  Paris pendant la premiĂšre moitiĂ© du xixe siĂšcle, Paris, François, 2004 [1996], Les nomades du vide. Des jeunes en errance, de squats en festivals, de gares en lieux d’accueil, Paris, La Traveller Dave, 2012, Traveller Homes, Stroud, Amberley Marcelo, 2009, Sur les routes. Le phĂ©nomĂšne des New Travellers, Paris, Éditions ligneGarland David, 2001, The Culture of Control. Crime and Social Order in Contemporary Society, Chicago, University of Chicago Clifford, 2003 [1973], La description dense. Vers une thĂ©orie interprĂ©tative de la culture », L’EnquĂȘte de terrain, D. CefaĂŻ Ă©d., Paris, La DĂ©couverte, p. Stuart et Jefferson Tony Ă©d., 2006 [1976], Resistance through Rituals. Youth Subcultures in Post-War Britain, Londres-New York, Kevin, 2000, New Age Travellers. Vanloads of Uproarious Humanity, Londres-New York, Cassell. 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Pour emprunter les mots de l’économiste Milton Friedman, figure influente des milieux conservateurs et libertariens amĂ©ricains, une crise, qu’elle soit actuelle ou perçue, a le potentiel de produire une rĂ©elle transformation sociale; lorsqu’elle survient, les actions entreprises dĂ©pendent notamment des idĂ©es qui traĂźnent dans l’inconscient social1. Suivant ce prĂ©sage, ou cet avertissement, quelle transformation sociale peut-on espĂ©rer ? Une telle entreprise de dĂ©placement du sens commun a de meilleures chances d’opĂ©rer progressivement si nous reprenons contact avec le potentiel Ă©mancipatoire des arts. Il s’agit peut-ĂȘtre lĂ  d’un enjeu important du travail des artistes expĂ©rimenter des alternatives aux modes de vie existants, les maintenir vivants et disponibles jusqu’à ce que le politiquement impossible devienne inĂ©vitable. L’art comme vecteur du progrĂšs est un programme ambitieux, certainement pas nouveau; or je crois qu’il est toujours possible grĂące Ă  l’entretien d’amitiĂ©s, Ă  l’intĂ©gration d’une pensĂ©e et d’une pratique contre-hĂ©gĂ©monique, ainsi qu’en rĂ©imaginant nos futurs collectifs. Actio in distans Au moment oĂč les sociĂ©tĂ©s doivent nĂ©gocier les modalitĂ©s d’une distanciation sanitaire des corps, nous pourrions voir les arts en tant que territoires des amitiĂ©s inclusives. En introduction de l’essai RĂšgles pour le parc humain 2000, rĂ©ponse Ă  la Lettre sur l’humanisme de Heidegger, le philosophe Peter Sloterdijk souligne comment l’édification d’une pensĂ©e humaniste s’est appuyĂ©e sur l’entretien d’amitiĂ©s Ă  travers le temps. Que ceux qui expĂ©dient des messages ne soient pas en mesure de prĂ©voir qui en seront les rĂ©els destinataires fait partie des rĂšgles du jeu de la culture Ă©crite. Les auteurs s’embarquent dans l’aventure, pourtant, et mettent en circulation leurs lettres Ă  des amis non identifiĂ©s2. » Il en va de mĂȘme pour les arts visuels oĂč les Ɠuvres sont bien souvent destinĂ©es Ă  un public dont l’identitĂ© est symptomatiquement inconnue des artistes. En suivant la pensĂ©e de Sloterdijk, nous comprendrons que la crĂ©ation permet sans doute de rejoindre, en addition de nos contemporains, toute une communautĂ© de filiation qui n’existe pas encore. Du point de vue Ă©rotologique, cette amitiĂ© hypothĂ©tique entre ceux qui rĂ©digent des livres ou des lettres et ceux qui les reçoivent reprĂ©sente un cas d’amour Ă  distance – tout Ă  fait dans l’esprit de Nietzsche –, pour qui l’écriture a le pouvoir de transformer l’amour du prochain – et du proche – en amour pour une vie inconnue, lointaine et future3. » Sloterdijk ajouterait que la crĂ©ation jette non seulement un pont entre des amitiĂ©s dĂ©jĂ  Ă©tablies bien que gĂ©ographiquement Ă©loignĂ©es, mais [qu’]elle lance [aussi] une opĂ©ration vers l’inconnu, actionne la sĂ©duction sur le lointain, ce que dans le langage de la magie de la vieille Europe on appelle actio in distans visant Ă  reconnaĂźtre l’ami inconnu et Ă  l’inviter Ă  se joindre au cercle4. » Les artistes sont rarement en mesure de comprendre l’étendue des signaux amicaux qui sont communiquĂ©s Ă  travers leurs Ɠuvres et donc de saisir l’importance que ces derniĂšres ont dans la vie des publics qui les reçoivent. Les Ɠuvres agissent comme des intermĂ©diaires, empruntant une certaine polysĂ©mie du langage pour avoir action dans le monde physique; une action alchimique sans doute. Encore s’agit-il de sĂ©curiser les conditions matĂ©rielles Ă  la crĂ©ation, d’entretenir l’espace d’attention nĂ©cessaire Ă  sa rĂ©ception et surtout d’étendre le cercle des personnes y Ă©tant invitĂ©es. Il s’agit peut-ĂȘtre lĂ  d’un enjeu important du travail des artistes expĂ©rimenter des alternatives aux modes de vie existants, les maintenir vivants etdisponibles jusqu’à ce que le politiquement impossible devienne inĂ©vitable. LibertĂ© synthĂ©tique Sous quels critĂšres l’utilitĂ© » des artistes est-elle dĂ©terminĂ©e ? Comment leur travail pourrait-il ĂȘtre rĂ©munĂ©rĂ© adĂ©quatement ? Il est rĂ©vĂ©lateur de voir comment, avec l’épidĂ©mie de COVID-19, le terme de travailleur essentiel s’est imposĂ© dans le langage populaire. À juste titre, l’attention est d’abord portĂ©e au personnel soignant. Or, au moment oĂč l’on tente d’étendre Ă  qui s’appliquerait le qualificatif essentiel », on retombe vite dans les dictats de l’économie. Selon la philosophe amĂ©ricaine Nancy Fraser notre crise gĂ©nĂ©rale est une crise d’hĂ©gĂ©monie. [
] Les idĂ©es indispensables pour ce constat viennent d’Antonio Gramsci. L’hĂ©gĂ©monie est le terme qu’il emploie pour dĂ©signer le processus par lequel une classe dirigeante fait apparaĂźtre sa domination comme naturelle en installant les prĂ©supposĂ©s de sa propre vision du monde en tant que sens commun de la sociĂ©tĂ© dans son ensemble5. » Suivant la pensĂ©e de Gramsci, l’hĂ©gĂ©monie nĂ©olibĂ©rale est constituĂ©e autour de deux composantes normatives essentielles la distribution et la reconnaissance recognition6. Dans le premier cas, la distribution reprĂ©sente la circulation du capital au sein d’une sociĂ©tĂ©, ce qui revient Ă  identifier qui peut lĂ©gitimement recevoir un salaire, pour quel travail et en quelle mesure. Le principe de reconnaissance traite quant Ă  lui de la distribution symbolique du respect ou de l’estime. Notons que des politiques progressistes de reconnaissance ou de reprĂ©sentativitĂ© peuvent servir Ă  cacher l’absence de politiques de distribution qui seraient rĂ©ellement bĂ©nĂ©fiques aux communautĂ©s concernĂ©es S’appuyant sur les forces progressistes de la sociĂ©tĂ© civile, les nĂ©olibĂ©raux ont diffusĂ© une philosophie de reconnaissance qui Ă©tait superficiellement Ă©galitaire et Ă©mancipatrice. Au cƓur de cette Ă©thique se trouvaient des idĂ©aux de diversitĂ©, d’empowerment des femmes, de droits LGBTQ+, de post-racisme, de multiculturalisme et d’environnementalisme. L’égalitĂ© signifiait la mĂ©ritocratie7. » Une lecture succincte des fondements de l’hĂ©gĂ©monie nĂ©olibĂ©rale permet de mieux saisir les questionnements internes qui traversent actuellement le milieu culturel. DĂ©fendre uniquement la culture en pointant les retombĂ©es Ă©conomiques qu’elle gĂ©nĂšre revient Ă  concĂ©der que sa valeur n’a d’égale que son habilitĂ© Ă  reconduire l’hĂ©gĂ©monie qui, pourtant, la mine. ConcrĂštement, la prĂ©caritĂ© financiĂšre des artistes, la disparition des ateliers ou l’accĂšs restreint au financement public poussent Ă  entretenir une vision compĂ©titrice de la crĂ©ation. En apparence, un systĂšme de mĂ©rite partage les artistes qui pourront poursuivre leur travail de celles et ceux qui seront refoulĂ©s aux marges. La socialisation devient du networking; la crĂ©ation une forme sophistiquĂ©e de branding. Lorsque Sloterdijk relate l’histoire de l’Occident de l’aprĂšs-guerre et l’érosion subsĂ©quente des modes de transmission de la pensĂ©e humaniste, voire de la dĂ©sirabilitĂ© de cette derniĂšre, le philosophe fait valoir la nĂ©cessitĂ© d’un projet d’auto-Ă©ducation, indiquant qu’il faudrait s’inquiĂ©ter de l’absence d’un tel projet au XXIe siĂšcle. N’est-ce pas lĂ  une considĂ©ration particuliĂšrement pressante en temps de crise ? Comment envisager de nouvelles perspectives pour la modernitĂ©, axĂ©es autour des idĂ©aux de l’écologisme, du progrĂšs, de la raison, de la libertĂ© et de la dĂ©mocratie ? Qui seront les porteurs de ces idĂ©aux ? Je propose de reconnaĂźtre l’impasse qui se poursuivra si nous acceptons de taire l’infiltration de la pensĂ©e nĂ©olibĂ©rale dans la dĂ©finition et le sous-financement de la culture. PlutĂŽt que de nous contenter d’une Ă©conomie de survie, rĂ©clamons-nous des mouvements populistes et progressifs de redistribution. Nous parlerons ici de participer Ă  la construction et Ă  la circulation d’un rĂ©el projet contre-hĂ©gĂ©monique; et non plus Ă  l’amĂ©nagement de bulles de rĂ©sistance ou d’émancipation, aussi fragiles et cosmĂ©tiques puissent-elles se rĂ©vĂ©ler. Dans l’essai Inventing the Future, Postcapitalism and a World Without Work 2015, Nick Srnicek et Alex Williams rappelleront que la libertĂ© est une entreprise synthĂ©tique, non pas un cadeau naturel8 ». Les auteurs expriment ici un malaise, c’est-Ă -dire que la libertĂ© individuelle demeure un concept limitĂ© Ă  son cadre matĂ©riel. Soyons rĂ©alistes de reconnaĂźtre que sous le capitalisme nĂ©olibĂ©ral, la rĂ©elle Ă©mancipation ne s’est rĂ©alisĂ©e que pour une classe sociale de plus en plus restreinte. La poursuite d’un projet contre-hĂ©gĂ©monique vise notamment Ă  maximiser les libertĂ©s synthĂ©tiques pour toutes et tous, Ă  tendre vers le dĂ©ploiement de notre horizon collectif. Dans cette perspective, nous aurions Ă  repenser complĂštementnotre rapport au temps libre, au travail et au salariat. Ken Lum, Melly Shum Hates Her Job 1989Plexiglass, impression chromogĂšne et vinyle. Courtoisie de royale projects Encore aujourd’hui, le travail des artistes inclut principalement des actions pour lesquelles aucun salaire n’est considĂ©rĂ© comme justifiĂ©. Ce travail invisible comprend des formes de recherche, d’éducation, de soin, de travail domestique, Ă©motionnel ou de reproduction de la sociĂ©tĂ©. Non exclusives aux activitĂ©s des artistes, ces formes de travail non reconnues par un revenu touchent de maniĂšre disproportionnĂ©e les femmes et les groupes minoritaires. À ce titre, l’implantation de mesures Ă©conomiques progressistes telles que le revenu minimum universel ou le salaire Ă  vie9 », pour ne nommer que celles-ci, offre des avenues Ă  considĂ©rer pour Ă©tendre la dĂ©finition du travail socialement nĂ©cessaire. Bien entendu, toute sociĂ©tĂ© contemporaine doit laisser place Ă  une Ă©thique du travail en valorisant le devoir de faire Ɠuvre utile pour autrui et non pas que pour soi-mĂȘme. Comme le souligne l’économiste Philippe Van Parijs lors d’un entretien avec l’artiste Hannah Black, le revenu minimum universel ne se dĂ©barrasserait pas d’un devoir d’utilitĂ© sociale. Au contraire, puisqu’il Ă©largit l’éventail des activitĂ©s socialement utiles, rĂ©munĂ©rĂ©es ou non, ouvertes Ă  ceux qui en ont le moins; il renforce la lĂ©gitimitĂ© d’un tel devoir moral10. » Les fruits du besoin et du dĂ©sir Il faut savoir reconnaĂźtre les signes qui ne trompent pas la crise actuelle est une caractĂ©ristique interne et inĂ©vitable du capitalisme tardif. Comment, nous, les artistes, les commissaires, les historiens, les mĂ©diateurs et les travailleurs de la culture pourrons-nous nous positionner, au-delĂ  du langage visuel qui nous lie, en tant qu’alliĂ©es et alliĂ©s, guides et visionnaires pour un imaginaire post-capitaliste ? Ce n’est pas tant que l’art contemporain soit apolitique, bien au contraire. Les artistes jouent dĂ©jĂ  un rĂŽle essentiel dans l’analyse critique de leur Ă©poque. Il s’agit plutĂŽt ici d’une lettre que je transmets aux amies et aux amis pour que nous continuions Ă  paver les voies du futur. Notre utilitĂ© sera sans doute rĂ©vĂ©lĂ©e par l’actualisation d’un imaginaire utopique permettant de repenser nos structures sociales, Ă©conomiques et technologiques. En annexe d’une réédition du cĂ©lĂšbre texte Utopia de Thomas More, publiĂ© pour la premiĂšre fois en 1516, China MiĂ©ville rappelle que l’utopisme n’est pas motivĂ© par l’espoir, encore moins par l’optimisme, l’utopisme Ă©merge du besoin et du dĂ©sir11. Amies et amis, rĂ©clamons notre temporalitĂ© naturelle le futur. L’utopie que nous mettrons en mots, en images et en formes puisera son Ă©nergie dans le dĂ©placement du sens commun. Soyons sensibles, soyons habiles Ă  capter et Ă  amplifier le dĂ©sir de transformation du monde. Mais ne nous faisons pas d’idĂ©es, un tel projet rencontrera de l’indiffĂ©rence, de la friction, voire de l’hostilitĂ©. Peut-ĂȘtre s’agit-il lĂ  d’un indice de l’utilitĂ© des artistes et de leurs Ɠuvres pour le futur, celui d’entretenir une certaine indĂ©sirabilitĂ©. Je terminerai en soulevant ces quelques mots que Deleuze nous a offerts lors de la confĂ©rence L’art et les sociĂ©tĂ©s de contrĂŽle Quel est ce rapport mystĂ©rieux entre une Ɠuvre d’art et un acte de rĂ©sistance ? Alors que les hommes qui rĂ©sistent n’ont ni le temps, ni parfois la culture nĂ©cessaire pour avoir le moindre rapport avec l’art. [
] Tout acte de rĂ©sistance n’est pas une Ɠuvre d’art, quoique d’une certaine maniĂšre il en soit. Toute Ɠuvre d’art n’est pas un acte de rĂ©sistance et pourtant d’une certaine maniĂšre, elle l’est12. »
VivreEn Marge De La Societe Original Qui Vit En Marge De La Societe Il Vit En Marge De La Societe; Se Met En Marge De La Societe; Jeune Vivant Plus Ou Moins En Marge De La Societe; En Marge De La Societe; Mode De Vie Des Artistes En Marge De La SociĂ©tĂ©; Il Vit Sans Regles, En Marge De La Societe; Mene Une Existence Au Jour Le La solution Ă  ce puzzle est constituéÚ de 6 lettres et commence par la lettre B CodyCross Solution ✅ pour MODE DE VIE DES ARTISTES EN MARGE DE LA SOCIÉTÉ de mots flĂ©chĂ©s et mots croisĂ©s. DĂ©couvrez les bonnes rĂ©ponses, synonymes et autres types d'aide pour rĂ©soudre chaque puzzle Voici Les Solutions de CodyCross pour "MODE DE VIE DES ARTISTES EN MARGE DE LA SOCIÉTÉ" CodyCross Saisons Groupe 76 Grille 4 7 7 Partagez cette question et demandez de l'aide Ă  vos amis! Recommander une rĂ©ponse ? Connaissez-vous la rĂ©ponse? profiter de l'occasion pour donner votre contribution! CODYCROSS Saisons Solution 76 Groupe 4 Similaires
Topic des gens qui ont pour projet de vivre en marge de la société ? du 11-10-2020 20:22:46 sur les forums de jeuxvideo.com
La compagnie de production Tour de Bras prĂ©sente les Rencontres de Musiques SpontanĂ©es numĂ©ro 32 les 7, 9 et 10 octobre prochain, Ă  la CoopĂ©rative Paradis de Rimouski. Le festival de musiques improvisĂ©es accueillera des artistes quĂ©bĂ©cois, canadiens et internationaux. Soulignons au passage la prĂ©sence de l’important musicien Ă©lectroacoustique Erikm, du rĂ©putĂ© Quatuor Bozzini ainsi que des musiciens d’Hubert Lenoir dans le projet DooDooDoo. Le festival prĂ©sentera Ă©galement des musiciens essentiels des musiques crĂ©atives europĂ©ennes, dont la percussionniste Camille Émaille et le trompettiste et manipulateur de synthĂ©tiseurs tchĂšque Petr Vrba. Cet automne, Tour de Bras s’associe au Quatuor Bozzini pour faire rayonner les musiques nouvelles Ă  travers le QuĂ©bec avec l’évĂ©nement QuĂ©bec Musiques ParallĂšles QMP. QMP est association informelle d’artistes, de producteurs et de diffuseurs, de lieux Ɠuvrant sur des routes parallĂšles, en marge de l’industrie, reliant les rĂ©gions et les grands centres. Humainement et virtuellement. Sous la double direction artistique d’Isabelle Bozzini et d’Éric Normand, l’évĂ©nement souhaite faire rayonner les musiques de crĂ©ation d’ici dans toutes les rĂ©gions du QuĂ©bec et hors des grands centres. Ne ratez pas nos concerts Ă  Matane, RiviĂšre-du-Loup, L’Isle-Verte et Albertville! Tous les concerts des RMS 32 s’inscrivent dans la programmation de QuĂ©bec Musiques ParallĂšles. Programmation complĂšte CoopĂ©rative Paradis, Rimouski Le jeudi 7 octobre 20 h – ErikM // Camille Émaille trio ErikM – Idiosyncrasie Camille Émaille en trio avec Petr Vrba et Éric Normand Le samedi 9 octobre 20 h – DooDooDoo // Haliriki Co-prĂ©sentĂ© avec E27 et Suddenly Listen DooDooDoo Pierre-Emmanuel Beaudoin, batterie Alexandre Martel, traitement sonore Lou-Adriane Cassidy, traitement sonore Jean-Étienne Colin-Marcoux, traitement sonore Haliriki Norman Adams, violoncelle Brandon Auger, Ă©lectroniques Éric Normand, basse et effets Antoine LĂ©tourneau-Berger, percussions et Ă©lectroniques Le dimanche 10 octobre 19 h – Quatuor Bozzini + RĂ©my BĂ©langer de Beauport // LĂ -dehors. » Quatuor Bozzini Clemens Merkel, violon StĂ©phanie Bozzini, alto Isabelle Bozzini, violoncelle Alissa Cheung, violon RĂ©my BĂ©langer de Beauport LĂ -dehors Eric Brochard, Spatialisation, reverb et traitement informatique EriKm, Lutherie informatique LoĂŻc GuĂ©nin, Percussions, objets acoustiques trouvĂ©s, voix Les billets sont disponibles sur Quoi Vivre Ă  Rimouski Autres spectacles prĂ©vus au Bas-St-Laurent et en GaspĂ©sie 6 octobre – Matane Camille Émaille + Petr Vrba + Éric Normand / ErikM 7 octobre – Albertville NOORG / Quatuor Bozzini 8 octobre – RiviĂšre-du-Loup Camille Émaille + Petr Vrba + Éric Normand / ErikM 9 octobre – Mont-Louis NOORG / Quatuor Bozzini 17 octobre – L’Isle-Verte – Quatuor Bozzini / Chorale Joker
Laprochaine sĂ©ance des Doctoriales se tiendra sur Zoom et sur inscription (en Ă©crivant Ă  contact.doctoriales.serd@gmail.com) le samedi 12 dĂ©cembre de 10h30 Ă  12h30. Elle sera composĂ©e de deux communications : “Le cirque entre marginalitĂ© et culture de masse” de LĂ©a de Truchis (UniversitĂ© Paul ValĂ©ry Montpellier 3) et “‘D’un cĂŽtĂ© l’univers et de l’autre
AccueilArtsLe photographe Antoine Bruy est parti Ă  la rencontre de ceux qui ont choisi de vivre en marge des villes et de leurs autant une sĂ©rie de portraits que le carnet de bord d’une annĂ©e sur la route. Ce sont bien sĂ»r les paysages, les points de vue Ă©poustouflants, mais Ă©galement ces traces de vie dans une nature luxuriante qu’Antoine Bruy a tentĂ© de documenter avec Scrublands “les brousses” en français. La sĂ©rie du jeune photographe lillois a rapidement attirĂ© l’attention d’une foule de mĂ©dias anglo-saxons dĂ©sirant l’interroger sur son rapport avec cet “objet” singulier, mais Ă©galement connaĂźtre l’histoire derriĂšre cette galerie de de routeC’est le hasard et le voyage qui ont amenĂ© Antoine Bruy Ă  Scrublands. D’abord en stop Ă  travers les campagnes françaises, le photographe rencontre pour la premiĂšre fois l’objet qu’il tentera d’apprĂ©hender quelques annĂ©es plus tard. C’est ensuite en Australie, au cours d’un sĂ©jour dans une ferme, grĂące au rĂ©seau WWOOF pour “World Wide Opportunities on Organic Farms” qu’il prĂ©cise son projet de reportage et planifie le voyage qui en 2010 et 2013, grĂące au rĂ©seau, Antoine Bruy visitera de nombreuses fermes et vivra mĂȘme un an sur la route en Europe, passant de fermes en fermes.“Pour ce qui est du rĂ©seau WWOOF, un site internet rĂ©pertorie toutes les annonces des fermiers qui se proposent d’accueillir des gens. À partir de lĂ , j’ai choisi certains types de fermes j’ai commencĂ© Ă  m’intĂ©resser Ă  des Ă©leveurs qui faisaient du bio, puis aux gens qui avaient une activitĂ© agricole et surtout, qui Ă©levaient sans l’intention de vendre.”Les photos du diplĂŽmĂ© de l’école nationale des arts visuels de Bruxelles sont plus que documentaires. Flirtant avec la sphĂšre de l’intime, elles dĂ©voilent un mode de vie autant que des scĂšnes que l’intĂ©ressĂ© n’aurait pu capturer sans ĂȘtre pleinement en immersion. Et il ne s’en cache pas.“Quand j’arrivais dans une ferme, je ne disais pas que j’étais photographe. C’était important pour moi d’avoir un premier contact et de voir s’il y avait une alchimie avec les personnes que je dĂ©sirais photographier. C’est ce qui m’intĂ©resse dans la photo tisser des liens avec des gens et prendre des images que je n’aurais pas pu prendre autrement.”Certains clichĂ©s en sont un tĂ©moignage poignant.“Je voulais photographier l’autosuffisance, pas l’autarcie !”Face Ă  ces populations, c’est un sujet particulier que l’artiste voulait traiter et tout un tas de fils philosophiques qu’il voulait tirer comment peut-on vivre Ă  l’écart des villes et de leurs fracas ? Quelles sont les raisons et la nature de cet exil ? De quoi est-il fait et comment ces populations parviennent Ă  survivre Ă  l’écart de tout, dans des territoires qui semblent hostiles pour le commun des “citadines” ? Autant de questions qu’Antoine Bruy a Ă©prouvĂ©es au contact des fermiers qu’il a rencontrĂ©s.“Aucune personne n’était complĂštement exilĂ©e, ne serait-ce que parce qu’ils accueillaient des Woofer
 La thĂ©matique que j’aborde dans cette sĂ©rie reste celle de l’autosuffisance, pas de l’autarcie. Pour ce qui est de l’exil en tant que tel, les situations Ă©taient assez disparates certains avaient fait des choix extrĂȘmes – pas de machines, pas de pĂ©trole – mais la plupart possĂ©daient des ordinateurs, des portables. De maniĂšre gĂ©nĂ©rale, cet exil Ă©tait fait pour des raisons militantes.”Des fermes isolĂ©es des campagnes europĂ©ennes et leurs galeries de visages, Antoine Bruy est depuis passĂ© Ă  une sĂ©rie tout aussi documentaire, mais peut-ĂȘtre plus ancrĂ©e dans la rĂ©alitĂ© politique de l’époque. Avec Behind the Bushes, le jeune homme dĂ©sire offrir un visage plus “laudatif” aux Roms. Une dĂ©marche assez proche de Scrublands, malgrĂ© les diffĂ©rences manifestes entre les deux objets. Le photographe commente “Il y a un lien Ă©vident entre les deux sĂ©ries, ne serait-ce qu’en termes d’architecture. J’ai essayĂ© de montrer dans les deux cas comment ces gens sont acteurs de leur propre habitat. Je trouvais que c’était une maniĂšre intĂ©ressante de poser la question de leur survie. On appelle ça de l’autoconstruction. Dans le cas des Roms, j’ai trouvĂ© ce biais’ intĂ©ressant pour sortir d’une description misĂ©rabiliste de cette population.”Froids, bruts, les clichĂ©s d’Antoine Bruy interpellent. En raison du sujet qu’ils traitent, bien Ă©videmment, mais aussi pour leur qualitĂ© esthĂ©tique. C’est Ă  l’essence des personnalitĂ©s rencontrĂ©es qu’il s’attaque, Ă  ce qui fait leur intimitĂ© la plus cachĂ©e. Il traque leur personnalitĂ© dans les moindres poses, les habitudes, les expressions du visage, la rencontre des de la teneur politique qu’on peut leur attribuer, ces photographies ne semblent ĂȘtre que le tĂ©moignage des maniĂšres qu’a l’ĂȘtre humain de rĂ©pondre aux dĂ©fis du milieu qu’il habite. Elles sont le journal de la survie de populations particuliĂšres, mais aussi une fenĂȘtre sur une alternative ou une altĂ©ritĂ© qu’on se cache bien trop des clichĂ©s d’Antoine Bruy sont disponibles sur son voir aussi sur Konbini jKO8.
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  • mode de vie des artistes en marge de la sociĂ©tĂ©